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Chant de la Promesse, Eric de Beukelaer, Michel Nève de Mévergnies, Nicole Janssens de Bisthoven, Notre-Dame des Eclaireurs
Bénédiction des vitraux venant de l’église du Sacré-Cœur à Cointe (Liège), à laquelle ils avaient été offerts par nos grands-parents en souvenir de notre Oncle Michel NM, officier à la RAF et tué « en service commandé » en 1943
L’église de Cointe, terriblement dégradée, ne servant plus au culte, appartenant à une asbl et risquant à tout moment d’être vendue ou de connaître un sort non-religieux, nos tantes, sœurs d’Oncle Michel, avaient suggéré que nous récupérions ces vitraux installés à la demande de leurs parents, en 1946.
(Presque) sitôt dit, sitôt fait ! L’Ourlaine a été unanimement choisie 😉 pour accueillir ce souvenir familial: après démontage du vitrail de l’église de Cointe, réfection par des vitrailleurs compétents, conception puis réalisation de l’édifice destiné à installer ce vitrail en trois morceau, enfin installation il y a quelques jours dans son nouveau lieu, sur la terrasse devant la maison. Il ne restait plus qu’à bénir le « monument » et les personnes ! A la suite de la messe familiale à Becco, le 6 juillet dernier, l’assemblée s’est réunie pour assister à cette bénédiction.
Tante Nicole, dans un émouvant témoignage, a raconté l’aventure de notre oncle, parti à 17 ans avec notre père (à peine plus âgé de deux ans) pour rejoindre l’Angleterre… d’où il partira définitivement pour le Ciel. Vous pouvez lire son témoignage, juste sous les photos.
Après ce témoignage, le Chant de la Promesse a retenti, suivi de la bénédiction par Eric de Beukelaer. Le chant à Notre-Dame des Eclaireurs a clôturé ce moment émouvant, qui a permis de rappeler des souvenirs familiaux, qu’ont partagés avec joie les amis présents !
Michel Nève de Mévergnies
Ce vitrail, qui représente l’Archange Saint Michel accueillant Michel au Paradis fut façonné à la demande de nos parents, juste après la guerre, et placé dans le bas-côté de la Basilique de Cointe, notre paroisse à l’époque.
Apprenant, au printemps 2011, par un flash du journal parlé, que la Basilique était reprise par un milliardaire hollandais, pour en faire un centre culturel, et craignant que : soit le vitrail disparaisse, soit qu’il décore un endroit peu adapté, Dédette et moi avons lancé un SOS aux enfants de Xavier et à Jean-Marie.
Pourrait-on l’enlever, le restaurer et le placer… où?
La procédure fut entamée et poursuivie au prix de moult démarches de nos neveux… et le voilà arrivé ici ! Nous sommes très reconnaissantes à Bruno et Caroline de l’avoir installé chez eux !
Notre frère Michel était le 4ème enfant de nos parents, Paul et Caroline (Albert, Miryam, Xavier, Michel, Bernadette et Nicole). Michel était un frère charmant, toujours joyeux et même farceur ! Il avait de beaux cheveux blonds ondulés que Maman ne désirait pas trop raccourcir. Jusqu’au jour, où Michel durant la messe, agenouillé au banc de communion, se vit refuser l’hostie. Oh ! Pourquoi ? demanda Michel – Parce que, dit le prêtre, les jeunes filles ne peuvent communier si elles n’ont rien sur la tête ! La belle toison fut rapidement coupée !
Au collège St-Servais, il avait beaucoup d’amis, mais surtout UN! André de Biolley, avec lequel il formait vraiment une paire de jumeaux, deux têtes sous le même bonnet ! prêts à toutes les activités, sportives et amusantes ! La pensée d’André accompagnera Michel pendant tout son séjour en Angleterre.
Le 10 mai 1940, c’est la guerre ! Michel, surexcité, réveille toute la famille pour contempler le plafond de Messerschmitt, avions de chasse allemands, qui envahissent le ciel.
La radio transmet des messages émouvants et encourageants du Roi Léopold, félicitant entre autres les forts de Liège ! Puis un message -répété – du gouvernement s’adressant aux jeunes gens de 17 à 20 ans, leur enjoignant de rallier un point de regroupement à Lobbes. Michel n’a pas encore 17 ans, mais il supplie Papa de le laisser partir avec Xavier ! Une prière intense au pied de la potale, ah la fameuse potale ! Vous verrez, dit Michel, je reviendrai Général ! Et les voilà partis, Xavier et lui, avec une énorme valise en cuir à soufflets !
Après la campagne des 18 jours et la Capitulation, un message nous arrive de Xavier, de l’hôpital de Lille où il a été opéré en urgence d’une mastoïdite… sous les bombes ! Il a encouragé Michel à continuer seul, direction la côte française. Ce que Michel a fait, seul, puis accompagné des deux frères Van den Bogaert rencontrés en chemin, et avec lesquels il a entretenu cette amitié pendant ces 3 années de guerre. (Ces deux frères sont morts il y a peu, ils parlaient encore avec grande émotion de leur camarade Michel…)
Embarqué sur un des 3 bateaux à grain qui partaient pour l’Angleterre, Michel, affamé, demanda à un abbé qui se trouvait avec lui, si manger quelques poignées de grain ne serait pas un vol ! Deux des bateaux furent coulés par les Allemands.
Accueilli froidement en Angleterre, qui redoutait l’infiltration d’espions, Michel fut fouillé et interrogé. À sa demande de rejoindre l’armée anglaise, il lui fut répondu qu’il était beaucoup trop jeune et devait passer un an au Collège de Brighton. Déception de Michel ! qui laissa partir Modeste et Etienne Van den Bogaert, un peu plus âgés, vers l’engagement à l’Armée.
Nous n’avons eu aucune nouvelle de Michel pendant 6 mois. C’est un message de la Croix-Rouge de Suède qui, fin octobre ‘40, nous a appris : Michel bien arrivé.
Un an de Collège, cela passe vite ! Michel a pu s’engager dans l’Armée de terre, d’abord, avant d’entreprendre la formation de pilote. Quelle joie, il a 18 ans ! D’abord sur Hurricane puis Spitfire, il réussit les tests, passe en solo et reçoit ses ailes ! Il est nommé sous-lieutenant à 19 ans ! Avant son premier vol, Michel écrit : Il fait si beau, et dire que c’est la guerre et que je vais m’entraîner à tuer et à détruire…
Lors de sa dernière mission avant de partir au combat, il décolle tôt vers le nord de l’Angleterre, le Northumberland, passe au-dessus d’une colline, et là… on ne sait pas… Sans doute a-t-il été ébloui par un soleil dardant, en accrochant un fil à haute tension. Les seuls témoins étaient des fermiers qui l’ont vu s’écraser au sol.
Ses compagnons d’armes lui firent d’émouvantes funérailles.
Quel choc, pour nos parents surtout, d’apprendre cela un mois plus tard… Michel parti gamin et mort à 19 ans, sans qu’ils l’aient jamais revu.
Michel avait gardé sa Foi intacte, et contagieuse ! Il récitait souvent le chapelet, en pensant à Maman. Il écrit encore dans son carnet de route : L’aumônier promet d’écrire à Papa et Maman si je ne revenais pas… Quoique dans le fond, je garde le plus ferme espoir de rentrer en Belgique, je veux prendre mes précautions. Je veux que, si j’étais tué, Maman sache au moins que je suis bien mort.
Peu de temps après la Libération, une de nos cousines, Nicole Verhaegen, recevait un groupe d’officiers de la RAF. Un d’entre eux lui dit: J’ai connu un type épatant, qui avait beaucoup d’ascendant sur ses copains, et qui était parvenu à entraîner plusieurs pilotes à assister à la messe de minuit à Noël (Michel en parle avec joie dans son carnet). Je l’ai vu prier avec une telle intensité que cela m’a bouleversé, moi qui, en général, passais au bar toute la nuit de Noël. Depuis, j’ai toujours demandé de voler la nuit de Noël, pour penser à ce souvenir en évitant les guindailles. Nicole Verhaegen lui a demandé: Vous savez encore comment s’appelait ce pilote? – Oui, il s’appelait Michel Nève.
Et voilà, merci !
Nicole Janssens de Bisthoven,
L’Ourlaine, le 6 juillet 2014